Grille ouverte

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  MediaWiki:IDEO GIU
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Année de création 2002
Auteur
Régulé par ---
Nombre de locuteurs >15
Parlé en musique improvisée
Idéomonde associé L’espace sonore
Catégorie Langue artistique
Langue expérimentale
Langue musicale
Langue gabaritique
Langue flexionnelle
Typologie Langue a priori
Protolangage
Métalangage
Alphabet idéophones (pas d’alphabet)
Lexique ~30
Version ---
Codes de langue
ISO 639-1
ISO 639-2
ISO 639-3 ---
Préfixe Idéopédia MediaWiki:IDEO GIU

Le langage de Grille Ouverte, également appelé Giu (\gui.u\) et pouvant être abrégé en GO! est une idéolangue sonore créée en 2002 destinée à l’improvisation musicale collective<ref> Pierre Sauvanet, L'improvisation entre création et interprétation, 2006, p. 163-176.</ref>. Elle permet la description de référentiels musicaux, notamment en termes d’harmonie et de métrique, ce qui en fait un métalangage. De façon pratique, elle est destinée à construire, en cours de jeu et par le son, le support commun aux musiciens improvisateurs<ref> Sylvain Mangiarotti, La grille ouverte, 2022, kaozic éditions, Ramonville-Saint-Agne. </ref>.

La notion de "Grille" vient du jazz où l'on utilise pour improviser des progressions d'accords que l'on nomme "grille" ou "grille harmonique"<ref>Référence</ref>. Toutefois, son champ d’application n’est pas restreint à un style particulier, le langage pouvant être appliqué à d’autres styles de musiques. L'expression d'"ouverte" trouve son origine dans l'idée de forme ouverte selon le sens défini en 1962 par Umberto Eco dans Opera aperta (l'Œuvre ouverte<ref>Umberto Eco, L'Œuvre ouverte 1965. Seuil, Paris. ISBN : 978-2-7578-5017-6</ref>): à l'opposé de l'œuvre close, qui est figée, l'œuvre ouverte est "inachevée", et son achèvement "est confié à l'interprète"<ref> Ibid. p.17</ref>. Plus encore qu'ouverte, elle peut être considérée selon Pierre Sauvanet comme "ouvrante" car elle "dynamite, dans son principe même, les différents types de fermetures qui menacent tout processus d'improvisation en acte"<ref>Pierre Sauvanet, La grille ouverte – Préface, p.10</ref>.


Présentation

Genèse

Le langage de Grille Ouverte est née de la volonté d’échapper au déterminisme de la forme des improvisations collectives, que celles-ci soient basées sur un support préétabli ou sans aucun support. L'un de ses objectifs de départ de cette approche était de concilier liberté individuelle et liberté collective. Elaborée en 2002, elle a été utilisée pour la première fois, en public, lors d’un concert qui s’est tenu à Toulouse au club du Mandala, le 19 décembre 2002.

Affiche du premier concert utilisant la Grille Ouverte

thumb|Extrait de concert utilisant la grille ouverte

Fonctionnement

La Grille Ouverte est une langue sans consonne ni voyelle, basée sur le son musical. Elle ne s’appuie sur aucune langue préalable. Elle est basées sur des idéophones (i.e. idéogrammes sonores) qui, de façon pratique, se réalisent sous la forme de motifs mélodico-rythmiques. Ceux-ci peuvent être représentés visuellement sous la forme d’idéogrammes. Ces motifs mélodico-rythmiques se caractérisent par une information redondante : contenue à la fois dans le rythme et dans la mélodie. Cette redondance permet aux signes une très grande plasticité d’expression dont découlent deux dialectes, l’un purement rythmique, l’autre purement mélodique. La Grille Ouverte est également une langue flexionnelle, permettant la description d’une très grande diversité de modes musicaux grâce à l’usage de suprafixes, qui en font une langue à tons, au même titre que le chinois ou le vietnamien par exemple.

Sa vocation est tout à la fois artistique (outil d'expression) et pratique (outil de communication). Ces deux fonctions peuvent entrer en concurrence. Afin de minimiser cette concurrence, elle est construite autour d'un nombre très réduit de signes sonores (concision destinée à faciliter l'apprentissage et rendre la communication plus efficace), mais surtout sur des idéophones extrêmement plastiques afin de rendre son intégration musicale aussi contextuelle que possible.


Idéophones

La Grille Ouverte est basée sur un très petit nombre d’idéophones. Recourir à des voyelles et des consonnes aurait pu permettre le développement d'un lexique d'une très grande diversité pour en faire un langage universel, comme c'est l'intention du Solrésol, mais qui aurait été peu adapté au contexte musical visé, pour des raisons d'efficience et mais aussi pour des raisons techniques.

En effet, d’un point de vue sonore, les voyelles renvoient au timbre musical, c’est-à-dire à une qualité de son. Or le timbre des instruments est spécifique à chaque instrument et assez peu malléable, donc difficile à utiliser pour produire différents types de voyelles. Les consonnes renvoient généralement à l’attaque des sons. Les instruments de musique permettent de produire une certaine diversité d’attaques sonores mais qui ne correspondent pas à des consonnes. Pour recourir à un alphabet, une correspondance aurait pu être établie comme c'est le cas pour certaines langues sifflées (voir par exemple la langue sifflée du village d'Aas dans les Pyrénées<ref>Cette langue sifflée est en fait une modulation sifflée de l’occitan. Elle dispose de 4 voyelles définies par la hauteur du sifflement et 4 à 6 consonnes définies par les modulations du son.</ref>), mais qui ajouterait un niveau de complexité supplémentaire entre signifiant et signifié.

L'objectif étant d'utiliser cette langue en cours de performance, elle se doit d'être le plus immédiate possible. Sa spécialité musicale a donc été privilégiée sur son universalité.


Grammaire

Du fait de sa concision, la grammaire de la Grille Ouverte est relativement réduite. Elle ne comporte ni pronoms, ni verbes, ni genre explicites. Pour cette raison, elle peut être considérée comme un protolangage, ce qui paradoxalement n'exclue pas un certain raffinement, propre à la grammaire musicale.

Les mots du langage de Grille Ouverte peuvent présenter les fonctions d’appel (¡ !), de paramétrisation (P), de déclenchement (D) et d’inhibition (i). Pour des raisons de concision, certaines de ces fonctions peuvent être cumulatives. En pratique, tous les mots du langage présentent une information paramétrique musicale. Les mots constituants le langage peuvent être catégoriser de la façon suivante :

  • Mot d’appel (¡P!): Ils sont souvent caractérisés par un motif répété deux fois afin de facilite leur détection. Cette répétition est très utile notamment en phase d’apprentissage comme c’est le cas pour l’apprentissage de nombreux langage (papa, maman, bébé, coucou, dodo, etc.). Cette répétition n’est pas pour autant systématique et peut parfois être éludée.
  • Mots paramétriques simples (P): Ils permettent de définir l'un des paramètres musicaux du référentiel. Il peut s'agir par exemple d'une caractérisation du type d’harmonie (de la triade à l’heptatonique), et de la métrique (nombre de temps par mesure), etc.
  • Mot paramétriques déclencheurs (D): Signes sonores déclenchant l’ensemble des paramètres énumérés à partir du dernier appel non inhibé. On distinguera les déclencheurs nets qui fixent précisément l'instant de transition (synchronisateur ↓), des déclencheurs flous qui ne le fixent pas explicitement (↔).
  • Mots paramétriques auto-déclencheurs (PD): Mots paramètres de changement dont l’énonciation appelle en même temps la transition (sauf cas d’inhibition du déclenchement).
  • Mots inhibiteurs (i): Signe sonores annihilant la fonction de déclencheur de certains signes. L’inhibition dépend d’un ordre de priorité. L’action des signes d’inhibition concernent les mots déclencheurs (D ou PD) mais aussi, de façon indirecte, les appels dans leur relation aux déclencheurs auxquels ils sont associés.

Pour finir, pour des raisons de généricité et d’efficacité, la syntaxe descriptive des modes est gabaritique, alors que la syntaxe descriptive de la métrique est agglutinante.


Lexique

Le lexique de la Grille Ouverte peut être classé en trois catégories principales. La première catégorie concerne l’harmonie (fondamentales et modes), la seconde celle de la mesure (métriques et tempos), et la troisième rassemble d’autres types de paramètres musicaux.

Notes

La description des notes se fait par l’usage d’idéophones permettant de définir l’ensemble des notes chromatiques sans distinction des altérations en dièse ou en bémol (i.e. la même description est utilisée, par exemple, pour Do# et Réb, etc.). On dispose ainsi de douze idéophones permettent donc de définir chacune de ces notes. On notera toutefois un problème hérité des instruments transpositeurs : pour un même doigté, certains instruments de musique produisent en effet des notes différentes. Pour tenir compte de cette difficulté, les idéophones sont définis par rapport à une note de référence qui sera différente suivant l’instrument concerné. Cette note sera le Do pour les instruments en Ut (l’ensemble des cordes, flûtes, hautbois, basson, etc.), le Ré pour les instruments en Sib (clarinette, saxophones ténor et soprano, etc.) <ref>car pour entendre un Do les instruments en Sib doivent jouer un Ré</ref>, le La pour ceux en Mib (saxophones alto et baryton, etc.), etc. Les idéophones utilisés pour définir une fondamentale, à moins d’être inhibé par un autre élément de syntaxe, jouent également le rôle de déclencheur. Son usage fait donc référence à un temps présent, mais ce présent est flou puisqu’il ne définit pas, en soi, l’instant précis d’application. En pratique, les idéophones ne sont jamais utilisés pour parler des notes en tant que telles. Ils servent, par métonymie, à désigner la fondamentale d’un mode.

Modes musicaux

La description de l’harmonie se fait en deux mots. Le premier est destiné à décrire le mode musical et le second à fixer la fondamentale. La description du mode se fait grâce à l’utilisant de gabarits rythmiques. A ce jour, il en existe quatre pour définir les triades mineure, majeure, diminuée et augmentée. Chaque gabarit est composé d’un motif de trois événements sonores (radical), répété deux fois. La description complète d’un mode est obtenue par flexion mélodique du gabarit. Ces flexions correspondent à des suprafixes se superposant au gabarit. Trois types de suprafixes sont possibles : montant, invariant et descendant. Superposés au premier exposé du radical, les deux premiers suprafixes permettent de définir le second et le quatrième degré. Ceux superposés au second exposé du radical servent à définir les sixième et septième degrés. L’usage du suprafixe invariant laisse le degré indéfini.

Numération

Un système de numération est nécessaire pour définir une certaine diversité de métriques. Deux idéophones correspondant à +2 et +3, et leur miroir par rapport à l'horizontal correspondant à −2 et −3 sont utilisés comme base pour définir les premiers entiers naturels et relatifs. Les nombres sont obtenus par agglutination additive, par exemple :

0 = +2 −2 ;

+1 = +3 −2 ;

+2 = +2 ;

+3 = +3 ;

+4 = +2 +2, etc.

Et de même, pour les entiers négatifs :

−1 = +2 −3 ;

−2 = −2 ;

−3 = −3 ;

−4 = −2 −2, etc.

Par définition, +1 sert à définir une métrique avec tempo mais non mesurée, 0 annonce l’absence de tempo, −1 la fin du morceau. Les entiers positifs définissent directement la métrique (+2 : métrique à deux temps ; +n : métrique à n temps). Il en est de même des nombres négatifs mais après un espace de silence (−2 : métrique à deux temps après deux temps de silence ; −n : métrique à n temps après n temps de silence). Le recours aux idéophones de numération jouent le rôle d’inhibiteur des éventuels déclencheurs à venir à l’exception de celui du tempo.

Tempo

Un seul et unique idéophone est utilisé pour définir le tempo. Son rôle est explicite puisqu’il marque des temps précédents l’instant du changement, soit

1, 2, 3, 4, (1)

où le (1) désigne le premier temps de la nouvelle mesure. Les quatre temps ici évoqués ne sont pas explicitement chiffrés, l’idéophone peut donc être utilisé quelle que soit la métrique visée. Le premier temps, i.e. (1), que le motif de tempo à définir après le 4 ne doit pas nécessairement être marqué. La marque explicite des quatre temps du motif n’est pas non plus obligatoire. De façon pratique, la marque du tout premier temps n’apparaît pas indispensable sur tempo lent. De ce fait,

2, 3, 4, (1)

apparaît souvent suffisant ; et même

3, 4, (1)

sur tempo très lent. De façon symétrique, la marque du dernier temps avant transition n’est pas indispensable sur tempo rapide, soit

1, 2, 3, (4), (1)

L’idéophone de tempo est un déclencheur mais aussi un neutraliseur des précédentes inhibitions, permettant le déclenchement simultané de tous les paramètres précédemment énoncés. Il s’agit aussi d’un marqueur précis du temps, il caractérise ainsi le présent immédiat.

Autres paramètres

Un réservoir lexical permet d’agir sur d’autres paramètres tels que les nuances, les accélérations/décélérations, etc. A moins d’être utilisés dans une zone neutralisée, ces idéophones sont des auto-déclencheurs au présent flou.

Syntaxe

La syntaxe des phrases permet à la fois de définir les changements tout en fixant les éléments qui seront conservés. Les phrases les plus simples s’obtiennent par l’énoncé d’idéophones auto-déclencheurs (PD). C’est notamment le cas des idéophones qui servent à décrire une fondamentale par l’énoncé de l’intervalle à une note de référence. Cet énoncé fournit ainsi la fondamentale du nouveau référentiel à venir tout en conservant tous les autres paramètres en cours d’utilisation (mode, métrique, tempo, nuances etc.). Des phrases de plus grand niveau de complexité sont obtenues en utilisant des appels non déclencheurs qui nécessitent donc l’usage d’un déclencheur. C’est le cas des gabarits modaux (mineur, majeur, etc.), qui permettent de définir un mode avec précision, mais nécessitent de définir la fondamentale pour déclencher une transformation complète de l’harmonie (mode + fondamentale). Par définition, l’usage de l’idéophone d’harmonie inhibe tous les idéophones auto-déclencheur à l’exception de la fondamentale, permettant la modification combinée de paramètres autres que l’harmonie (nuances, etc.). Les phrases de plus grande complexité encore peuvent être obtenues en utilisant les idéophones de numération qui inhibent non seulement les idéophones auto-déclencheurs mais aussi les idéophones non déclencheur, permettant la modification synchrone de tous les paramètres du référentiel, à un instant choisi.

De façon informelle, un phrase très générale se présente sous la forme suivante :

Appel paramétrique inhibiteur + {paramètres, paramètres auto-déclencheurs, déclencheurs inhibés} + déclencheur


Harmonie

L’expression

Fondamentale ↔

modifie la fondamentale du mode tout en conservant le mode (par exemple, partant du mode ‘Ré lydien’, l’expression « Fa » fera passer en ‘Fa lydien’).

Mode + Fondamentale↔

modifie la fondamentale et le mode, l’expression du mode seul n’étant pas déclencheur.

Métrique

Métrique + Tempo↓ [1]

Phrases complexes

Ordre de priorité d'inhibition:

Métrique >> Mode >> Fondamentale (ou autre)

Métrique + ( ... ′↔′ ) + tempo ↓ [1]

De façon formalisée :

¡Pij! + {P, PD, DX↔}k,k’,k’’,… + Dj

¡Pij! + {P, PD, DX↔}k,k’,k’’,… + Dj↓ [1]

suivant le type de déclenchement engendré par le premier appel, non inhibé, où les indices j et k,k’,k’’, etc. définissent une relation de priorité telle que :

Pij >> Pik,k’,k’’, …

inhibant les Dik,k’,k’’, …

en DX↔k,k’,k’’, …

et les ¡Pik,k’,k’’, …!

en simples Pk,k’,k’’, ….

Conjugaison

D’un point de vue fonctionnel, à ce stade de développement du langage, il n’existe pas à proprement parler, ni de verbe ni de pronom personnel. De façon pratique, on distinguera toutefois différents types de temps : le futur proche (vocabulaire descriptif), le présent flou et le présent immédiat (vocabulaire déclencheur). Peut être entendu comme un infinitif (« Transiter vers … »), un impératif (« Transitons/transitez vers … »), comme un futur proche (« Nous allons transiter vers … »), comme un présent interrogatif (« Et si on transitait vers … ? »), comme un conditionnel (« Je souhaiterais transiter vers … »). Personne : Indéfini « On va transiter vers … » « Je vais transiter vers … »


Niveaux et registres de langage

Registre Soutenu / familier Niveau Bas / Haut

Relations de groupe

Liens

Liens internes

Liens externes

  • Grille harmonique [1]
  • Une présentation de la Grille Ouverte proposée dans Wikimonde [2]
  • Une présentation de la Grille Ouverte remise en contexte [3]

Références

Umberto Eco, L'Œuvre ouverte 1965, version originale révisée de Opera aperta, 1962. Seuil, Paris. ISBN : 978-2-7578-5017-6

Pierre Sauvanet, L'improvisation entre création et interprétation, 2006, p. 163-176. In: L'imaginaire musical entre création et interprétation, Dir. Mara Lacchè, L'Harmattan, collection Univers musical. ISBN : 2-296-00128-9

Sylvain Mangiarotti, La grille ouverte, 2022, Editions Kaozic. ISBN : 978-2-9558364-0-8 [4]

Notes

<references/>